mercredi 15 juin 2011

Testament biologique (ou de fin de vie) et euthanasie

Suivant un article que j'ai publié dans mon blog sur la portée légale du testament biologique, un ami  (facebook) James Arthur a soulevé quelques points forts pertinents qui méritent réflexions.  Je n'ai pas la prétention de répondre ici aux questions complexes liées au droit à l'euthanasie (des centaines de spécialistes du droit, du milieu médical, philosophes, sociologues, etc. l'on fait et ce débat est loin d'être terminé).  Seulement, ses réflexions sur le testament biologique vs l'euthanasie m'ont amenées à réfléchir un peu plus loin que sa simple portée légale.

Comme James Arthur, il y a peut être lieu de s'interroger sur la promotion du testament biologique (ou de fin de vie).  D'où provient-elle ? Du mouvement du "Mourir dans la dignité"? Probablement.

Ce testament biologique est-il aussi utile qu'on le laisse croire?   Quels sont les véritables enjeux à la promotion du testament biologique ? Promouvoir l'euthanasie par la bande ? Quels sont ses dangers ? 

Depuis les trois dernières années, je n'ai jamais eu autant de demandes sur le sujet. Les gens (très âgées la plupart du temps) sont préoccupés par cette question et ce, avant même de se préoccuper de leur testament légal ou de leur mandat en prévison de l'inaptitude.  Ces gens, souvent vulnérables,  semblent croire que le milieu médical expérimentera sur eux d'atroces traitements à défaut de signer un testament biologique mentionnant un refus aux acharnements thérapeutiques advenant leur incapacité.

A la base, le principe du testament biologique est de manifester clairement sa volonté en ce qui concerne l'acharnement thérapeutique.  Mais pourquoi pas l'inverse, tel que soulevé par M.James Arthur.  Pourquoi le testament biologique n'exprimerait pas un consentement à tout traitement disponible et ce, nonobstant le pourcentage et statistiques sur les chances de réussite et/ou qualité de vie qui pourrait en résulter.

Quels sont donc les principes légaux dans notre droit civil concernant le consentement aux soins et traitements ? Notre Code civil du Québec oblige le médecin à obtenir le consentement du patient aux soins, si ces soins sont inusités, seraient inutiles ou comporteraient des conséquences intolérables.  En cas d'incapacité du patient à donner un consentement valable, le médecin doit se tourner vers ses premiers répondants  (parents).  En réalité, est-il autrement ? Les médecins devant le peu d'espoir face à un patient dans un état végétatif dont les traitements seraient inutiles se tournent-ils pas plutôt vers la famille pour obtenir un consentement pour l'arrêt d'intervention ?  Mon expérience personnelle m'a permise de constater plutôt ce fait.

Si le testament biologique n'était que pour éclairer les proches dans ces situations inespérées, pour permettre dans le cas précis  le débranchement par exemple d'appareils qui maintiendraient artificiellement en vie une personne sans espoir qu'elle quitte cet état végétatif, à mon avis, le testament biologique est bienvenu.. Nous pouvons constater cependant que les modèles offerts pour ce "testament biologique (ou de fin de vie)»"  inclus de plus en plus des clause plutôt du genre euthanasie.

Je suis d'accord avec la professeure Danielle Blondeau, diplômée au doctorat en philosophie et spécialiste de bioéthique, lorsqu'elle affirme (devant le Comité sénatorial spécial, sur l'euthanasie) que le droit de mourir dans la dignité serait le processus de laisser la mort s'installer et suivre son cours tout en contrôlant les souffrances du malade.  Différent, dira-t-elle, du droit à la mort qui ouvre la porte à une intervention visant à faire délibérément mourir.  Toujours selon Danielle Blondeau, la frontière étant si mince entre l'euthanasie et l'aide au suicide qu'il existerait des dangers de dérapage. Cette position est également soutenue par le Barreau de Québec. 

Je réitère mes recommandations sur la prudence dans la rédaction des clauses dites de "volontés de fin de vie" et de s'assurer de bien en comprendre leur portée, les revoir régulièrement et y réfléchir si elles conviennent toujours.  J'ai vu des gens en fin de vie, être prêts à tout essayer et de continuer de croire en la vie  jusqu'à la toute fin et ce, contrairement à ce qu'ils auraient pu exprimer à un autre moment de leur vie alors en pleine santé et en contrôle.


Me Claudia Côté, B.A., LL.L.
Directrice générale
Fondation de l'Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal
et Directrice, Programme des dons planifiés
ccote@osj.qc.ca
www.saint-joseph.org

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